On savait que le cannabis était délétère pour le cerveau des adolescents, seulement cette étude parue dans le JAMA Psychiatry nous fournit des preuves accablantes.
Il s’agit d’une étude publiée par le consortium IMAGEN. Imagen (Imaging genetics for mental disorders), c’est le nom d’une collaboration menée entre 8 sites européens (dont la France – INSERM UA10 « Trajectoires développementales en psychiatrie » et le laboratoire Neurospin du commissariat à l’énergie atomique) dans laquelle plus de 2000 jeunes âgés de 14 à 22 ans ont été inclus et suivis entre 2001 et 2016 avec des IRM cérébrales annuelles.
Les auteurs commencent par rappeler que l’adolescence est marquée par des modifications structurales cérébrales importantes et ils font l’hypothèse que les modifications secondaires à la consommation de cannabis seront prépondérantes dans les régions cérébrales qui subissent les modifications les plus importantes à l’adolescence (la fameuse fenêtre de vulnérabilité cérébrale), c’est-à-dire le cortex cérébral.
Dans cet article, 799 adolescents ont été suivis entre l’âge de 14 et 19 ans et ils ne rapportaient pas de consommation de cannabis à l’inclusion.
Ils recherchent ainsi s’il existe une association entre d’une part l’épaisseur du cortex cortical (images d’IRM en 3D séquence T1) et d’autres part la consommation de cannabis (via le questionnaire ESPAD, European Survey on Alcohol and other Drugs avec des indices de fréquence et de quantité). Les résultats sont ajustés sur l’âge des participants, leur volume cérébral total, le genre, la dominance, le site géographique de recrutement et le score AUDIT (alcohol related problems).
Sans pouvoir retranscrire l’ensemble des résultats, deux sont sans appels :
- À l’âge de 19 ans, l’analyse transversale montre qu’il existe une association significative entre la consommation de cannabis (« au cours de votre vie ») et un amincissement du cortex préfrontal gauche et droit (p < 0,01).
- Le deuxième résultat montrait qu’il existait un effet dose significatif avec le temps, c’est-à-dire que l’amincissement dans ces régions corticales était majoré en cas d’une consommation plus importante (p < 0,01) (Figure ci-dessus).
La question que l’on se pose est l’implication en termes de fonctionnement à l’adolescence mais aussi à l’âge adulte. Dans cette étude, il y avait une association entre d’une part un amincissement du cortex préfrontal et d’autre part une impulsivité dite attentionnelle (échelle de Barratt) à l’âge de 19 ans.
L’ensemble de ces résultats souligne l’effet délétère du cannabis sur le cerveau de nos adolescents et pose la question des effets à plus long terme dans le contexte d’une légalisation éventuelle du cannabis à usage récréatif dans plusieurs pays.
Albaugh, M. D., Ottino-Gonzalez, J., Sidwell, A., Lepage, C., Juliano, A., Owens, M. M., … & IMAGEN Consortium. (2021). Association of cannabis use during adolescence with neurodevelopment. JAMA psychiatry, 78(9), 1031-1040.